La Liberation

Marie Lechner

 

Digitales. Hacktivisme. Objectif: cannibaliser le moteur via son système de pub.

 

 

GWEI, des clics pour casser Google

 

Pour empêcher le monstre Google d'asseoir son monopole sur l'information mondiale, Hans Bernhard du collectif autrichien Ubermorgen - également fondateur d'etoy et initiateur du site www.vote-auction.net, qui avait fait scandale à la dernière élection présidentielle en vendant aux enchères les voix des électeurs (1) - et Alessandro Ludivoco du magazine Neural.it ont lancé un projet sur le Web visant à cannibaliser le moteur de recherche. L'objectif, ambitieux, n'est autre que de racheter Google, grâce aux fonds générés via Adsense, le propre outil publicitaire du moteur de recherche. «Google will eat itself» (GWEI) comporte un site Web www.GWEI.org qui a tout l'air d'un magazine sérieux d'information sur le web marketing et l'e-business. Sa priorité n'est cependant pas d'informer les gens mais de capter le plus grand nombre de visiteurs à la recherche d'information et de les amener à cliquer sur les publicités textuelles placées automatiquement par le programme Adsense de Google. Lorsqu'un site web s'inscrit à Adsense (l'une des principales sources de revenus de Google), le programme affiche sur le site affilié des annonces ciblées. L'avantage, c'est que chaque clic sur une publicité est rémunéré par Google, qui verse un micropaiement au site hébergeur.

Parasites. Par conséquent, chaque fois que quelqu'un clique sur une pub, GWEI reçoit une somme qui sera ensuite réinvestie automatiquement dans l'achat d'actions Google. En d'autres mots, Google sera progressivement racheté via son propre système publicitaire. «Le plus grand ennemi d'un tel géant, c'est le parasite», analysent les adeptes du sabotage qui ont parallèlement alerté leur réseau pour l'inviter à visiter le site et à cliquer, et éventuellement à appliquer ce système à leur propre site. «Si les parasites sont assez nombreux à sucer des petites quantités d'argent dans ce système autoréférentiel, ils videront cette montagne de données artificielle et son risque inhérent de totalitarisme digital.» A long terme, le plan est de prendre Google et de redistribuer les actions à la communauté des internautes via le site GTTP «Google to the people». Un plan machiavélique qui a failli tourner court, Google ayant résilié son contrat pour le site GWEI.org dès qu'il a eu vent du projet. Ce qui n'a pas empêché les hacktivistes de continuer leur action sur d'autres sites tenus secrets. L'opération a rapporté pour l'instant 2 900 dollars et permit d'acquérir 12 actions Google.

(1) Primé à l'Ars Electronica 2005 qui se tiendra du 1er au 6 septembre à Linz (Autriche).